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Censure politique ou religieuse ? Le cas de l’Iran

Le 22 septembre 2023, à la galerie « Terrain Vagh’ » à Paris, la politologue et iranologue Hanieh Zaiei dresse un impressionnant bilan de la censure artistique, sous prétexte religieux, en Iran dans le domaine des arts et ce, depuis la prise de pouvoir par le système de Khomeini en 1979.

Donc, 44 ans après la révolution iranienne, la répression perdure dans le pays, s’élargit et dépasse les limites du pensable. Elle touche différents aspects de la société en matière des droits des Iraniens, mais aussi en censurant arbitrairement leur créativité artistique et culturelle.

Il y a un an, Mahsa Amini arrêtée à cause de quelques mèches dépassants son voile, décède à la suite des traumatismes et mauvais traitements subis lors de sa garde à vue. Cette tragédie a fait soulever des Iraniens et a donné naissance au mouvement de contestation populaire, « Femme, Vie, Liberté » qui défend la liberté des femmes et leurs droits à l’égalité dans la société iranienne et lutte contre les discriminations dont elles sont l’objet.

La censure politique en Iran est à la fois physique et psychologique, prend des formes, des visages et des noms différents comme « la police des mœurs », « les gardiens de la révolution » etc. Elle impose un climat de terreur intellectuelle dans le pays poussée jusqu’à l’autocensure des Iraniens eux même, mais aussi l’installation d’une méfiance généralisée dans un régime qui ne cesse de durcir et devenir de plus en plus répressif et criminel.

Toutes forme d’expression en Iran est désormais cadenassée et doit passer au sein d’un organisme nommé « ministère de la culture et de l’orientation islamique » créé spécialement pour filtrer les opinions politiques des Iraniens. Il est aussi habilité à évaluer toute création artistique et accepter ou refuser d’accorder les autorisations artistiques. Ce dernier s’est autorisé d’ordonner la fermeture d’un cinéma, car il « nuirait à la morale islamique et menacerait la sécurité nationale ».

Hanieh Zaiei a souligné que la résistance iranienne face l’obscurantisme politico-religieux du régime de l’État islamique théocratique régnant depuis plus de quarante années maintenant, ne fait qu’augmenter et s’affirmer.

Elle cite comme Friedrich W. Nietzsche : « L’artiste a le pouvoir de réveiller la force d’agir qui sommeille dans d’autres âmes ».

En effet, comme c’est le cas pour tout le peuple iranien, réduit au silence par le régime, des écrivains, peintres, poètes, cinéastes et activistes ont subi la censure des mollahs qui ont contredit les options libérales de l’Islam[1]. Ainsi, emprisonnements, infanticides, féminicides, lourdes condamnations, interdictions de publier, de créer, de quitter le pays et de communiquer avec l’occident sont devenus les mots d’ordre de leur quotidien.

Cette répression n’a pas fait des Iraniens de simples victimes d’un régime totalitaire mais au contraire, il a engendré au sein de la société une résistance farouche en devenant encore plus créative dans le domaine du cinéma, la poésie, l’art plastique etc., tout en dissimulant leurs intentions et en inventant des codes et des langages spécifiques pour contourner les rouages des interdits et échapper à la censure et déjouer les inculpations.

Des artistes Iraniens mais aussi de simples citoyens ont exprimé leur colère de plusieurs façons, peinture, musique, dessin, caricature, cinéma etc.

Des femmes iraniennes ont dansé dans les rues sans voile. Le slogan « Femme, vie, liberté » est devenu un symbole de lutte et de résistance repris dans plusieurs musiques.

Des films de réalisateurs Iraniens comme Jafar Panahi, condamné à ne pas quitter le pays et ne pas faire du cinéma, a quand même réalisé plusieurs films oscarisés en Europe.

Des anonymes ont lancé une initiative spontanée en teintant les fontaines de Téhéran en rouge, couleur sang pour désigner les massacres perpétrés par le régime.

Et la liste est longue de cette créativité de la résistante iranienne qui n’aura sans doute, d’issue que la libération du peuple Iranien des griffes de la dictature et certainement, une victoire prochaine à la hauteur de sa résistance et de ses aspirations.

Touriah HORAIRA

 

[1] Lire l’excellent ouvrage de Zeina el Tibi, La condition de la femme musulmane, Paris, le Cerf, 2021.

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